L'article suivant est paru dans le numéro 26 du Correspondancier du Collège de ’Pataphysique,
daté du 15 sable 141 (15 décembre 2013).
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Le 9 décervelage 140 (16 janvier 2013 vulg.), le HamburgerMorgenpost fit état d’une inquiétante étude réalisée par l’Oberfeldarzt Björn Krapohl, chef du service
de chirurgie plastique et de chirurgie de la main à l’hôpital des forces armées
allemandes.
Bien que rasé de près, cet « amazone » ne fait pas illusion. Le visage, le biceps et les mollets sont mâles, sans même parler de la protubérance sous la jupette. |
Ce professeur constatait que sur deux cent onze patients mâles
opérés des seins en six ans, trente-cinq d’entre eux étaient issus du
Wachbataillon, un corps de gardes d’élite présent lors des cérémonies officielles
allemandes. Parmi ces trente-cinq gardes, vingt-six présentaient une hypertrophie
de la poitrine à gauche, soit 74 %. Le praticien établit en conséquence une «
corrélation significative » entre l’activité de ces militaires et la
gynécomastie du côté gauche et transmit illico les conclusions de son étude au
ministère concerné.
De quelle activité s’agissait-il ? De celle de plaquer de
façon répétée leur Karabiner 98 K (un Mauser) sur le côté gauche de la
poitrine, lors des exercices militaires, précise le Hamburger Morgenpost.
L’excitation fréquemment réitérée de cette zone provoque en effet une sécrétion
hormonale se traduisant par un amas relativement important, puisque le sein
gauche ainsi traité peut parvenir à remplir un bonnet C de soutien-gorge. La
correspondance amas-zone est en tout cas clairement établie.
Cette découverte kapitale conduit le pataphysicien à
s’interroger, comme le fit Plutarque, sur la réalité ou la véracité du mythe des Amazones, ou au moins à le relire à la lumière verte de sa chandelle. En
effet, comme il le note et comme chacun le sait, ces féroces viragos
n’hésitaient pas à brûler le sein droit de leurs filles ou à se couper le leur,
dans le but de mieux tirer à l’arc. Considérant les corps ainsi obtenus et
s’appuyant sur le principe d’équivalence, il pose donc l’égalité suivante :
(torse féminin) – (sein droit) = (torse
masculin) + (sein gauche).
Cela voudrait-il dire que les soldats de la garde d’élite
d’Angela Merkel sont des femmes mutilées ? Pas du tout, mais bien plutôt que
les intrépides guerrières de la mer Noire, qui ont tant fasciné Homère,
Virgile, Hérodote et Quintus de Smyrne, n’étaient en réalité que de vulgaires
troufions…
Le Wachbataillon à l’entraînement |
À force de bander leur arc et de frotter leur avant-bras contre un
mamelon viril, les militaires scythes, plagiant par anticipation leurs
collègues allemands, virent avec honte et effroi se développer sur leurs torses
velus une excroissance féminine, et cette excroissance trompa facilement, on le
conçoit, Bellérophon, Achille, Héraclès, Thésée, Priam et autres héros grecs
confrontés à leurs troupes belliqueuses.
Un problème de symétrie
À ce point de la démonstration, le pataphysicien se heurte à
un problème de symétrie. En effet, se dit-il, si les archers scythes tenaient
leur arme de la main gauche et la bandaient de la droite, c’est logiquement le
sein droit qu’ils auraient dû voir pousser à force de sollicitation pectorale.
Celui précisément que se coupaient les Amazones !
Écartant l’hypothèse, sans
fondement historique, d’une vision des Amazones dans le miroir du bouclier
d’Athéna, comme celle d’une armée de Méduses contre lesquelles marcheraient à
reculons des troupes de Persées, le pataphysicien, avec méthode, en arrive à la
seule conclusion possible : les soldats scythes tenaient leur arc de la main droite
et tiraient avec la gauche.
Cela n’a rien d’extraordinaire. Des histoires
comparables sont d’ailleurs décrites dans d’autres écrits antiques. Par
exemple, les Benjaminites, tribu sanguinaire s’il en fut, tiraient à la fronde
du côté gauche comme il est écrit :
Dans
toute cette armée, il y avait sept cents hommes d’élite gauchers.
Tous ceux-ci, avec la pierre de leur fronde,
étaient capables de viser un cheveu sans le manquer.
(Bible de Jérusalem, Jg 20:16.)
Tous ceux-ci, avec la pierre de leur fronde,
étaient capables de viser un cheveu sans le manquer.
(Bible de Jérusalem, Jg 20:16.)
Et s’ils avaient tiré à l’arc plutôt qu’à la fronde, ç’aurait été
bien évidemment du même côté.
Selon toute probabilité, les fières Amazones
étaient donc des gauchers.
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