Atropos coupant le fil de la vie (détail) |
La mort hante le dernier livre[1]
de Jean-Louis Bailly. Pas le phénomène physique, décrit avec force détails
scientifiques, dans son précédent roman[2],
mais le fil de laine marquant l’arrivée d’une course au ralenti, qui se déroule
dans une impasse et entraîne deux nonagénaires ennemis vers leur fin.
Sur ce
fil, pas de différence entre le juste et le salaud, le gros et le maigre, le
droit et le voûté, selon le bon principe d’équivalence.
La mort n’épargnera pas
non plus les spectateurs de cette course allégorique. Rachel la serveuse craint
d’autant plus la sienne qu’elle semble s’éloigner d’elle. La jolie mais triste Céline
signe par une petite mort scabreuse la fin de sa virginité, celle de son
premier amour et celle de sa e-réputation. C’est à l’aide d’un autre fil que le
petit Mathurin perdra sa dent de lait. Pour avoir mis la vidéo de cet événement
sur le Net, son père, lui, perdra sa femme.
Les photos numériques du voisin Florian
garderaient bien la trace de la course à la mort des Mathusalem, mais le narrateur
les efface presque toutes de la mémoire de son ordinateur. Trop floues, trop précises,
trop mièvres, trop indiscrètes, trop menteuses, à l’instar de nos souvenirs.
Pour
pouvoir évoquer à volonté leurs images éphémères, la jeune Margaux se fera
implanter un nanoprocesseur dans le cerveau. Illusion ! Une photo du temps
de leur enfance, imprimée celle là, avait transformé en ennemis les deux vieux coureurs.
Effacée, elle aurait peut-être empêché leur brouille, mais pas leur fin.
Les
fils du récit se tissent et s’entrecroisent. Au lecteur de trancher ?
[1] Mathusalem sur le fil (L'Arbre Vengeur,
2010). 12 euros.
[2] Vers la poussière, chez le même éditeur.,
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