Pédale, c’est ton but. Ce mur qui te fascine, n’en détourne
pas le regard, fixe-le sans baisser le front, bien droite sur la selle
inconfortable, ne t’autorise que de légers mouvements latéraux de la tête, à
gauche quand le pied appuie à droite, à droite quand le pied appuie à gauche. Pédale,
le mur est devant toi, patchwork de cartons déchirés, décor trash pour pièce réaliste,
ready made qui touche à l’abstraction. Tu connais chaque détail du mur. Tu l’as
nommé « le mur », avec ses boursouflures grises en bas, les raccords
de sa surface écaillée, les plis que font d’antiques couches de peinture le
long de ses fissures, les empreintes qu’y ont laissées des conduits démolis depuis des dizaines d’années. Pédale vers ton mur, surtout, ne ralentis pas le
rythme. N’accélère pas non plus, il ne va pas s’écrouler, il est là depuis si
longtemps. Deux gaines de cheminées,
surmontées de leurs pots de terre cuite rougeâtre, y sont toujours collées. Servent-elles encore à quelque chose ? Nulle fumée n’en sort, de la
mousse a poussé au bord. Tu pédales, tes yeux cherchant la suie parmi les
traces. Tu comptes les échelons qui courent jusqu’au toit. Dix-neuf, vingt,
vingt-et-un peut-être. Leur rouille fond peu à peu en coulées le long du mur. Toi aussi
tu transpires, mais tu pédales vers ton mur, comme chaque matin, sur ton vélo
d’appartement, immobile, devant la fenêtre qui donne sur le mur.
Paul Fournel, sors de ce corps !
RépondreSupprimer:-D
SupprimerUne contrepèterie s'est glissée dans mon texte : saurez-vous la trouver ?
RépondreSupprimerJe réponds... mais j'en ai tout plein, des contrepèteries... !
SupprimerJ'ai :
- ce fard qui se mutine
- évente-moi le dur
- le fond des lits sûrs
- pet dur vers ton mâle
- sonne l'urne enfumée
- de la boue a poussé au morse
- la truie par ses limaces
- leur couille fond peu à peu enroulée (je crois que c'est celle-ci...)
Beau texte !
Bravo Wana, tu l'as trouvée :-)
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