14 mai 2012

Hénin-Beaumont, les mines

Chevalets des puits
de Fouquières-lès-Lens
Jean-Luc Mélenchon et Marine le Pen ont donc choisi le théâtre de leur affrontement. Ce front-contre-front, qui évoque la lutte de deux bêtes à cornes, béliers des landes ou impalas de la savane, aura donc lieu à Hénin-Beaumont, ville du Pas-de-Calais proche de Lens dont un maire fut révoqué — fait extrêmement rare — en 2009. Tout le monde en parle comme si cette ville existait depuis toujours : pourtant Hénin-Beaumont n'a sous ce nom qu'une existence relativement récente. Je l'ai connue sous un autre. Et sa mise en lumière à la faveur de l'actualité politique m'a rappelé de nombreux souvenirs liés aux mines « eud' carbon », au drame de leur fermeture, aux catastrophes, au militantisme. Pour les évoquer, j'ai choisi la contrainte twittéraire des paragraphes indépendants de 140 caractères.

Hénin-Beaumont ne s’est pas toujours appelée Hénin-Beaumont. Pour moi qui l’ai connue sous son vieux nom d’Hénin-Liétard, c’était les Mines.
 « Les Mines ». Leurs noms m’angoissent encore. Des noms de catastrophes comme Courrières, Liévin ou Fouquières-lès-Lens, le 4 février 1970.
Noms de villages grisâtres comme le grisou, corons de briques, mauves de suie, mauves de pluies, terrils sombres et fumants. Hénin-Liétard !
Billy-Montigny, Noyelle-Godault, Sallaumines, Méricourt, Avion, Oignies, Harnes, Loos-en-Gohelle, Bully-les-Mines des noms qui m’angoissent.
Les mineurs français, les mineurs polonais, les mineurs marocains… La « bistoule » à cinq heures du matin. Je ne comprenais pas leur langue.
Dans les gorges grasses de poussière le « an » devenait « in », le « che » « ke », le « u » « eu », le « eur » « eux », le « age » « ache ».
Ça me rappelle l'histoire : « Commin konfait ch’ poulet Tatin din ch’Nord ? Ben, teu prinds ch’poulet, teul mets din ch’four et t’attinds ».
De Lille, on allait « dans les Mines », 30 bornes dans la 4L pourrie de Rémi L. Un jour le levier de vitesses lui est resté dans les mains.
J’avoue en avoir été secrètement soulagée : on coupait à l’expédition dans « Les Mines ». Tout ça c’était du temps où Serge s’appelait Marc.
Aujourd’hui les terrils sont verts, mais il y a toujours le chômage. D’autres coups de grisou menacent Hénin-Liétard, devenu Hénin-Beaumont.

EC

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