10 mars 2010

Œdipe


Eh bien quoi ? il suffit de confiner un pied pendant un mois et demi pour qu’il ne ressemble plus à un pied. Lorsque l’infirmière eut fini de scier le carcan de résine, on vit apparaître une chose informe. Au bout d’une jambe de serpent, rêche, dure, comme recouverte d’une couche de vernis écaillé, cette chose se présentait comme un fruit blet, presque pourri. Elle avait certaines caractéristiques d’un pied (cinq orteils et un talon, par exemple), mais ce n’était pas un pied. Certainement pas le mien. L’épaisseur considérable de la cheville abolissait tout semblant de transition entre la jambe et son extrémité. Le long du côté extérieur courait un filet marron, dont on sentait le relief au doigt, et qui était une croûte. Sur ce qui avait été le cou-de-pied, on observait les plis qu’avaient imprimés ceux des bandes de résine dans la chair enflée. Du côté intérieur, coulant du talon vers la plante, s’étalait une tache violacée, qui faisait pendant à une autre plus noirâtre s’insinuant vers le gros orteil. Et là-dessous bourgeonnait un amas fétide d’un blanc sale, comme si les cellules mortes de la peau, trop longtemps contenues, et qui avaient eu le temps de proliférer, se libéraient soudain au ralenti, dans une ignoble floraison que l’humidité du ruisseau dans lequel j’avais trempé ma chaussette au sortir du taxi avait sans doute favorisée.

2 commentaires:

  1. Yeurk, comme diraient nos amis américains.

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  2. beeeeeuuuuuuuuuuaaaaaaaaaaaaaaaarrrrrrrrkkkkkkkkkkkkk!!!!!!!!!!!! :o/

    N.

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