22 janvier 2008

Set de table

À l’Épicerie russe, je déjeune de saumon mariné, sur une icône représentant une théophanie (le baptême du Christ). Saint Jean-Baptiste, debout sur la berge en sandales fines, auréole et robe safran, oint délicatement le sommet du crâne d’un Jésus assez bel homme — grand, viril, élancé, sportif, avec des abdominaux en tablettes de chocolat — lui-même vêtu d’une serviette dorée élégamment nouée sur ce qu’elle est censée cacher, et d’une auréole décorée d’une croix. Son bras gauche est replié sur sa poitrine, contre laquelle il serre un rouleau d’écritures que j’espère saintes. Sa main droite pointe deux doigts vers le genou de son cousin tandis que trois autres — oui trois, j’ai bien recompté quinze fois ! — se replient sur le pouce. Il a donc six doigts à la main droite. Je ne crois pas avoir vu d’allusion même lointaine à cette particularité physique dans les évangiles. Ce Christ mutant est représenté au milieu du fleuve, mais sans souci de perspective, comme si l’eau était un plan vertical situé derrière lui. Il n’est donc pas mouillé le moins du monde par un Jourdain peu liquide, symbolisé par un aplat vert marin peigné de pâles ondelettes évocatrices de cheveux plutôt que de vagues. Sur l’autre rive se tiennent pourtant trois anges aux ailes rouges, déférents ou perplexes, qui lui tendent des draps de bain jaunes au cas où. Un quatrième semble subjugué par la colombe blanche s’inscrivant dans un cartouche bleu au dessus de la scène.

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